Une Sémi à Paris

Publié le par Fanny

Des Néons rouge et jaunes, une odeur de friture et Sémira sur une chaise du Mc Donald de Jaurès dans le 19ème arrondissement de Paris. Une goutte de gel hydro-alcoolique dans le creux de la main, elle s’apprête à avaler ses nuggets. Chez Sémira, les frites comme tout le reste se mangent délicatement, avec deux doigts et d’ailleurs, pourquoi Mc Donald n’a-t-il pas prévu de fourchette ? Peu importe, le Mc Donald est l’une des rares choses qui existe ici et en Martinique.

Arrivée dans la Région Parisienne en septembre dernier, elle se plait à raconter son histoire. Celle d’une gamine qui n’aurait jamais quitté sa famille si les études ne l’y avaient pas forcé. Sup de Pub. C’est l’école de marketing qui l’a arraché à son île. De quoi avoir aujourd’hui des souvenirs communs à bon nombre d’antillais qui ont quitté leur département. La douloureuse séparation d’avec ses proches, le supplice de l’aéroport qui veut dire que l’île est derrière une fois qu’on a passé la douane.

Aujourd’hui Sémira vit avec sa sœur à Saint Ouen. Une ville qu’elle déteste plus que tout. Et la grisaille de l’hiver n’arrange rien. Même si son petit appartement lui plait, le quartier semble tout de même faire injure à son petit coté maniaque qui rêve de luxe et de confort. Célibataire « parce qu’il n’y a que le coup de foudre » qui puisse la faire succomber, Sémira est toujours en compagnie de sa sœur ou de ses amies qu’elle compte sur les doigts d’une main.

Si elle a peu de proches c’est parce qu’elle l’a décidé. Une sélection qui fait partie intégrante de sa personnalité : « Je fréquente les gens parce que je les ai choisis et non parce que le destin les a placés sur ma route. Pour moi c’est évident, je ne vais pas devenir amie avec quelqu’un sous prétexte qu’il est mon voisin ou qu’on est dans la même classe ». Quand on lui dit qu’elle est insociable, elle répond sans hésiter qu’elle a « toujours été très sélective ».  « Ce n’est pas méchant mais je ne parle pas au gens si on n’a rien en commun. Je n’ai rien à leur dire et en général j’ai raison  de ne pas les fréquenter ! ». Puis elle rigole et repense à une histoire que ses parents lui répètent souvent. Lorsqu’elle était à la crèche, elle ne parlait à personne parce qu’une fois sortie de sa bulle familiale, elle tombait dans un quasi-mutisme. A tel point que le médecin scolaire, inquiet, a voulu lui faire rencontrer un psychologue. Pour elle c’est la preuve qu’elle n’a pas changé ; qu’aujourd’hui comme hier, elle est « vraie et entière ». « Que mon caractère plaise ou non ce n’est pas mon problème, je suis moi-même et j’assume tout, même mes défauts. Oui je suis égoïste et alors ? »

S’il y  a bien quelque chose qui ne lui a pas fait défaut ce sont les études. Au lycée elle découvre le portugais, une langue qui la fascine. Elle en aurait bien approfondit l’apprentissage mais la prépa littéraire semblait un meilleur choix. Pas pressée de quitter son île elle a tout fait pour y rester le plus tard possible : Hypokhâgne et khâgne à Fort de France, puis deux années de campus pour repousser l’échéance. Mais il a bien fallu se rendre à l’évidence, l’avenir d’une étudiante se joue sur le continent. Après son école de Marketing, Sémira aspire à devenir chef de produit. Un métier qui lui plairait et dont le salaire lui permettrait de vivre comme elle le souhaite : dans un certain luxe.

Mais son projet c’est surtout d’exercer ce métier sur son île. Parce que pour elle, la Martinique est le plus bel endroit du monde. Et comme le dit si bien Emil Michel Cioran, Paris est bien le « point le plus éloigné de Paradis ». 7000 km pour être exact. Pour Sémira c’est une distance qui fait tout la différence : « Je me sens plus Martiniquaise que française. Française c’est administratif, moi je suis Martiniquaise ». Et si elle distingue les nationalités, c’est surtout parce qu’elle estime qu’entre l’hexagone et la Martinique, il y a une marge immense. « Un breton ou un Marseillais à Paris ne sera jamais aussi dépaysé que nous. L’humour, les soirées, la vie, tout est différent ».  

Pour elle Paris est donc une nouvelle expérience, une nouvelle étape dans sa vie. A 21 ans, elle apprend à vivre loin de ses parents. Même si sa sœur partage son appartement, elle se sent déjà plus indépendante. Mais attention à ne pas associer indépendance et bonheur. Car Paris est loin de la rendre heureuse. Sémira trouve la vie parisienne extrêmement contraignante : « Tout est pénible ici : prendre le métro, sortir dans le froid et même s’habiller. Pourtant avant j’adorais ça, mais ici enfiler des pulls et des collants me fatigue ». Seul bon point pour la capitale « les magasins pour le shopping et les musées pour la culture ». Ouf sauvé !

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  Merci à Sémira...

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Publié dans Articles ISCPA

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Commenter cet article
M
<br /> OUI il devient indispensable à un futur journaliste ou à un journaliste tout court, d'avoir un blog, ou une existence sur le net. Je travaille au mien. Ce portrait est bien tiré! Tu le proposes<br /> pour la 4eme de couverture le Libé? lol! ya kkes fautes mais c super! Bisoos<br /> <br /> <br />
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C
<br /> g kiffééééééé!! :D é Sémira mrapL mwa ki voulé pa kité le pays! lol BigUp<br /> <br /> <br />
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